Épopée 1999-2000 : un 7ème sacre indiscutable

Épopée 1999-2000 : un 7ème sacre indiscutable

30 avril 2020 3 Par Franck C

Presque vingt ans déjà… Le 7ème titre de l’AS Monaco s’est acquis le 13 mai 2000 officiellement au terme de la 34ème journée de Ligue 1, mais les joueurs et les supporters du club princier avaient fêté ce titre de Champion de France le 15 avril à l’issue de la rencontre entre l’ASM et l’AS Nancy Lorraine au stade Louis II (score final 2-2). Il s’agit alors du 4ème titre national sous l’ère Campora avec une équipe composée de joueurs talentueux parmi lesquels D.Trezeguet, M.Simone, M.Gallardo, F.Barthez, R.Marquez, D.Prso, W.Sagnol, S.Lamouchi, L.Giuly, P.leonard, J.A.Riise, P.Christanval, P.Contreras etc, tous coachés par un “joueur du cru”, Claude Puel.

3 ans après un 6ème titre glané par Jeannot Tigana, l’ASM remporte donc brillamment le championnat en prenant les commandes dès la 13ème journée et sans les lâcher jusqu’à la 34ème et dernière journée (NB : le championnat de Division 1 était composé de 18 clubs disputant 34 journées officielles). Le club aurait pu réaliser le doublé Championnat-Coupe de France mais il en fut autrement in extremis. Quant à la Coupe d’Europe, paradoxalement, ce fut une mauvaise année pour les coéquipiers de Marco Simone et D.Trezeguet éliminés dès les huitièmes de finale de la Coupe UEFA. Récit d’une magnifique aventure monégasque qui débuta le 30 juillet 1999.

 

Un titre de Champion de France incontestable 

En voulant redorer l’image de marque du club et (re)donner du beau jeu réclamé par les supporters monégasques, J.L. Campora n’avait certainement pas prévu ce scénario incroyable à l’issue de la nouvelle saison qui débuta en juillet 1999. La saison précédente, en nommant Claude Puel comme nouvel entraîneur à l’issue du départ de Jean Tigana en début d’année 1999 suite à un enchaînement de mauvais résultats, l’homme fort de l’ASM avait sans doute imaginé que cette solution n’était que temporaire. Pourtant, Puel, qui avait fait ses armes comme préparateur physique puis entraîneur de l’équipe réserve de 1996 à 1999, avait de la ressource et remplit son nouveau rôle à merveille. Le coach actuel de l’ASSE réussit même à qualifier l’ASM en Coupe de l’UEFA lors de la 2ème partie de saison 1998-1999, échouant au passage à un point seulement de la 3ème place qualificative pour le tour préliminaire de la Ligue des Champions. A l’intersaison, Campora décide de maintenir sa confiance à Puel dont la côte de popularité est réelle auprès des joueurs et des dirigeants de l’ASM. Quand les joueurs reprennent le championnat à l’été 1999, le club a également effectué quelques retouches ambitieuses de son effectif. Campora a dû néanmoins se résoudre à laisser filer Titi Henry à la Juve, V.Ikpeba à Dortmund, F.Gava (Rennes), L.Martin (OM), S.Legwinski (Bordeaux), R.Spehar , F.Lefebvre (ASNL). Au rayon arrivées, le transfert médiatique de M.Simone en provenance du PSG version Canal + fait grand bruit. En défense, c’est un jeune mexicain d’à peine 20 ans qui débarque sur le Rocher, Rafael Marquez avec un autre défenseur chilien en provenance de Colo Colo, P.Contreras. L’effectif monégasque parait plus rodé et plus complémentaire quand débute la nouvelle saison de championnat.

Face à l’ASM se dressent pourtant des concurrents sérieux à la couronne nationale : les Girondins de Bordeaux champions de France en titre, le RC Lens champion en titre 1998, l’AJ Auxerre du légendaire G.Roux, le PSG de l’ère Biétry, et l’OL de J.M. Aulas (alors aux portes d’un règne ininterrompu de 7 années sur le Championnat de France). Malgré deux premières journées disputées avec un seul point au compteur, les hommes de Puel se montrent ensuite à leur avantage. Au soir de la 10ème journée, l’ASM est déjà troisième au classement à 3 points du leader auxerrois. Trois journées plus tard, l’ASM « prend le pouvoir » et la place de leader qu’elle ne lâchera plus jusqu’au soir de la dernière journée. Les coéquipiers de Barthez et Costinha resteront en tête de la D1 pendant 21 journées de championnat, un indicateur suffisamment révélateur de la performance sportive réalisée. Entre la 13ème et la 26ème journée, l’ASM enchaîne une série de 13 matchs avec 10 victoires, 2 nuls et une seule défaite… Impressionnant. Monaco est officiellement champion de France à trois journées de la fin à la faveur d’un match nul à domicile face à Nancy (2-2). Les chiffres parlent d’eux-mêmes : meilleure attaque (65 buts marqués en 34 journées) et meilleure défense (38 buts concédés en 34 matchs) de la Division 1. Au classement des buteurs, deux monégasques figurent sur le podium, D.Trezeguet (2nd avec 22 buts) et M.Simone (21 buts), tous deux devancés par un certain Sonny Anderson (23 buts). Au-delà de ces statistiques exceptionnelles, c’est la qualité de jeu de l’ASM qui resplendit et s’affirme comme l’une des plus belles affichées par le club.

Avec un virtuose argentin à la baguette au milieu de terrain, M.Gallardo, sans oublier le « lutin magique » L.Giuly, avec deux attaquants efficaces de grande classe, D.Trezeguet et M.Simone, des travailleurs de la récupération comme Costinha et S.Lamouchi, des « morts de faim en défense » comme W.Sagnol, Riise, R.Marquez et P.Christanval, et un gardien de but de grande classe, F.Barthez, l’ASM championne de France 2000 est à compter parmi les plus marquantes de l’histoire du club rouge et blanc. Ce beau tableau sera cependant terni par le départ de joueurs cadres à l’intersaison suivante parmi lesquels D.Trezeguet (Juve), F.Barthez (MU), S.Lamouchi (Parme) et W.Sagnol (Bayern Munich). L’autre explication à ces départs semble se résumer à un état d’esprit marqué par la lassitude de certains joueurs concernant les méthodes de l’entraîneur C.Puel : “On avait douze ou quinze points d’avance sur le second à un moment. On savait qu’on allait être champions. Mais Claude avait une rigueur de travail, du premier au dernier jour d’entraînement. Vers la fin du championnat, les cadres sont allés le voir pour lui demander de modifier les entraînements qui étaient un peu rébarbatifs. Claude n’a pas voulu changer ses habitudes et il s’est un peu mis le groupe à dos. »  concéda le défenseur belge P.Léonard à la presse (source So Foot, 2017).

Coupe de France : aux portes du doublé

Après les deux premiers matchs tous remportés à l’extérieur des 32èmes aux 8èmes de finale face à des équipes de niveau inférieur, l’ASM se frotte à l’OL en quarts de finale et va brillamment s’y imposer 3-1. Une alléchante demie finale attend alors les hommes de Puel au Stade Louis II. L’ASM y affronte le FC Nantes de R.Denoueix. Malheureusement, la défaite est au RDV et l’ASM perd ce match décisif (1-0) face au futur vainqueur de la Coupe de France (face à Calais). La Coupe de France échappe donc encore à l’ASM depuis 1991 alors que le club était en très bonne posture pour la remporter.

Coupe UEFA : la désillusion

C’est l’échec le plus difficile à comprendre de cette saison inoubliable. En effet, les Monégasques avaient le potentiel pour aller loin dans cette compétition européenne. Après des premiers et deuxièmes tours largement à leur portée (1er tour face à St Johnstone FC 6-3 ; 2è tour face au Widzew Łódź 1-3), les homme de Puel se frottent ensuite à l’AEK Athènes en 16èmes de finale et obtiennent leur qualification difficilement lors du match retour à Louis II (victoire 1-0 ; nul à l’aller 2-2). C’est malheureusement au tour suivant des 8èmes de finale que le couperet de l’élimination tombe…Face au RD Majorque, les rouge et blanc explosent au match aller en Espagne sur le score net et sans bavure de 4-1. Certes, le club espagnol était la saison précédente finaliste de la Coupe des Vainqueurs de Coupes (défaite face à la Lazio de Rome), mais les hommes de Puel ont lâché mentalement au cours de la seconde mi-temps malgré l’ouverture du score par Simone (1ère) ternie par l’égalisation espagnole de Stankovic (41è). L’ASM concéda ensuite deux penaltys (transformés par Stankovic), le premier sur une faute indiscutable de Christanval, le second consécutif à une erreur de relance de F.Barthez auteur ensuite d’une faute grossière sur un attaquant espagnol. Les Espagnols enfoncèrent le clou par Tristan à la toute dernière minute de jeu (90è). Annoncés comme potentiels favoris de l’épreuve, les Monégasques, malgré une victoire à domicile au match retour (1-0), quittèrent la coupe UEFA par la petite porte dès les 8èmes de finale.

 

Les joueurs qui ont marqué cette saison :

Trezegol :

L’attaquant franco-argentin, arrivé en 1995 sur le Rocher, fut assurément la pièce maîtresse de l’échiquier élaboré par C.Puel pendant la saison 1999-2000. Le natif de Rouen confirme son incroyable talent de buteur lors de cette saison de sacre national avec l’ASM. Associé en attaque à l’Italien M.Simone, et souvent servi sur un plateau par le maestro Gallardo, « Trezegol » devient à 22 ans l’un des meilleurs attaquants en action en Europe en inscrivant 22 buts en Championnat. Épanoui aussi en Equipe de France, fraîche championne du Monde en 1998, il donnera le but du sacre des Bleus lors du Championnat d’Europe 2000 aux Pays Bas lors de la finale de légende face à l’Italie remportée 2-1 avec son « but en or » inoubliable. Comme bon nombre de joueurs monégasques et à l’issue de la brillante saison 1999-2000, il sera déçu par la politique sportive « pas assez ambitieuse » du club présidé par Campora et partira en juillet 2000 à la Juve rejoindre Z.Zidane et D.Deschamps ses coéquipiers de l’Equipe de France.

Barthez :

Sa dernière saison à l’ASM, bien qu’achevée sur un 2ème titre de champion de France après celui de 1997 obtenu avec J.Tigana, fut marquée par une série de blessures qui lui font manquer une vingtaine de matchs et de mauvaises relations avec son entraîneur C.Puel. Le coach de l’ASM lui reproche d’être beaucoup moins investi dans son rôle de capitaine et dans la vie du groupe, notamment lors de la deuxième partie de saison. Le point de non-retour est atteint en avril 2000 après une défaite 4-2 à Marseille lors de la 30ème journée de championnat en avril 2000. Ce soir-là, l’OM menacé de relégation bat l’ASM au terme d’un match houleux pendant lequel l’arbitre M.Sars expulse 3 joueurs dont le défenseur belge P.Leonard et M.Gallardo côté monégasque. Mais l’incident le plus regrettable concernera le « guet-apens » tendu à la mi-temps à M.Gallardo par C.Galtier (entraineur adjoint de l’OM qui écopera de 6 mois de suspension suite à cet incident) dans le tunnel du Vélodrome. C.Puel reprochera à Barthez d’avoir été trop « gentil » face à son ancien club et d’avoir laissé gagner l’OM, alors menacé de relégation. Cet épisode sera à l’origine du départ du portier monégasque dans les semaines suivant le titre de champions de France mais aussi de vives tensions dans le vestiaire entre joueurs défendant M.Gallardo et les autres plutôt Barthez… L’ex portier toulousain a cependant été convaincu par le Prince Albert de rester une saison de plus sur le Rocher (moyennant une augmentation salariale jamais atteinte auparavant et concédée par Campora) malgré l’insistance de Manchester United et de Sir Alex Ferguson désireux d’en faire un remplaçant de prestige à Peter Schmeichel. Mais la fracture entre Puel et Barthez se creusa et devint trop importante, ce dernier prétendant dans la presse que le coach monégasque l’a accusé “d’avoir été acheté” par un OM qui jouait sa survie… Il devenait inéluctable qu’un départ du gardien international français était la seule issue possible.

 

L’équipe type de l’ASM saison 1999-2000 : F.Barthez, W.Sagnol, R.Marquez, P.Christanval (ou M.Djetou), Riise (ou P.Leonard), S.Lamouchi, Costinha, L.Giuly, M.Gallardo, D.Trezeguet,M.Simone (ou D.Prso)

Crédit photo : Icon sport, Serge Haouzi