Jean-Luc Ettori : L’entretien exclusif

Jean-Luc Ettori : L’entretien exclusif

6 janvier 2025 20 Par Romain P
755…c’est le nombre de matchs disputĂ©s par Jean-Luc Ettori sous le maillot rouge et blanc. L’homme d’un seul club, vĂ©ritable lĂ©gende de l’AS Monaco, c’est du cĂŽtĂ© de Tours que l’ancien gardien est Ă©tabli. De son arrivĂ©e au centre de formation, ses dĂ©buts, sa carriĂšre, l’Equipe de France et son amour pour le club, rencontre avec un personnage et une belle personne.
Jean-Luc bonjour avant toute chose comment ça va et comment se passe la vie à Tours ?
« Ça va trĂšs bien, avec deux de mes neveux nous avons trois affaires – un restaurants et deux bars – on bosse, on est content. A titre personnel, je suis trĂšs bien ici mĂȘme si voir la mer tous les jours me manque et un peu de soleil aussi (rire).
Le club de Tours va apparemment bien je suis allĂ© les voir en dĂ©cembre avec Delio Onnis qui Ă©tait de passage ; c’est pas mal, ils sont leaders de R1 et j’espĂšre qu’ils vont remonter. »
Le Sud ne te manque pas trop ?
« Bien sĂ»r, c’est le soleil et la mer qui me manquent, surtout qu’en ce moment il fait froid. Oui voir la mer tous les jours ça manque. »
Peux-tu nous raconter ton arrivĂ©e au centre de formation de l’ASM ?
« Je viens de l’INF Vichy je fais un match d’essai en 1975 avec l’AS Monaco contre Lyon oĂč on perd 2 Ă  0 mais j’avais convaincu les dirigeants de l’époque je crois que le prĂ©sident Ă©tait M. Orengo et l’entraineur Alberto Muro, ils ont dĂ©cidĂ© de me faire signer un contrat stagiaire que j’ai signĂ© avec le prĂ©sident Campora puisqu’il y avait eu un changement de prĂ©sident. »
Tu as visitĂ© le centre de performance et La Diagonale pour les 100 ans du club, les conditions Ă©taient diffĂ©rentes Ă  l’époque ?
« (il coupe) Ah oui, mais il ne faut surtout pas comparer, c’est complĂštement diffĂ©rent, c’était les balbutiements des centres de formation dans les clubs, on s’entrainait sur des terrains stabilisĂ©s, c’est une Ă©poque diffĂ©rente, mĂȘme pour les Ă©tudes c’est beaucoup plus structurĂ© aujourd’hui, tout a Ă©voluĂ©. Les jeunes, on Ă©tait ensemble du matin au soir, on vivait ensemble, dans de petits appartements, on mangeait au Biarritz, on se changeait Ă  l’ancien Stade Louis 2 et on allait Ă  pied sur le terrain d’entrainement. Autre temps, autres mƓurs, comme on dit. »
Tes débuts en pro ?
« Je fais un premier match le 21 dĂ©cembre 1975 Ă  Bordeaux, on perd 3 Ă  1 le seul entre 1975 et 1977 puis lors de la premiĂšre journĂ©e de la saison 77-78 je m’installe dans la cage suite Ă  la blessure d’Yves Chauveau ; on a gagnĂ©, j’ai enchainĂ© les matchs et je ne suis plus sorti de l’équipe. On est champion de France en montant de deuxiĂšme division. Les dirigeants avaient recrutĂ© du solide Courbis, Onnis, Gardon, Raoul Nogues, plus le phĂ©nomĂšne Christian Dalger et bien sur Jeannot Petit.
Et puis on Ă©tait un groupe soudĂ©, je me rappelle d’une soirĂ©e, on faisait les calculs pour la fin de saison autour d’un ou plusieurs verres, et on s’est dit qu’en gagnant les six derniers matchs on serait champions
 On a gagnĂ© les six derniers matchs
 On a Ă©tĂ© champion. Il y avait de la qualitĂ©, c’était du solide. »
Tu as Ă©tĂ© l’homme d’un seul club, par rapport Ă  ça est ce qu’il y a des regrets ? Des remords ?
« DĂ©jĂ  c’était compliquĂ© de partir Ă  l’époque, il n’ y avait pas l’arrĂȘt Bosman, tu n’avais droit qu’à deux joueurs Ă©trangers par Ă©quipe et puis j’ai toujours jouĂ© quelque chose, j’ai fait cinq finales de Coupe de France certes Ă©talĂ©es dans le temps, trois fois champion, jouĂ© la ligue des Champions, l’Europe quasiment chaque annĂ©e pourquoi est-ce que je serai allez voir ailleurs ? J’Ă©tais dans un des meilleurs clubs de France avec de grand joueurs, dans un endroit plus qu’agrĂ©able, franchement quand tu t’assoies tu te dis zĂ©ro regret, en plus j’avais un statut de titulaire sans tomber dans la facilitĂ©, c’était important. »
Est ce que des clubs sont quand mĂȘme venus frapper Ă  la porte ?
« En 82 le PSG, mais ça n’a jamais Ă©tĂ© trĂšs loin et puis les gens savaient que j’étais attachĂ© au club donc ils ne se manifestaient pas ou peu. »
En parlant de 82, il y a cette fameuse Coupe du monde en Espagne, au dĂ©but tu n’étais pas le favori pour ĂȘtre titulaire.
« Je pense que cela s’est jouĂ© au stage Ă  Font Romeu, je sortais d’une grosse saison individuellement mais l’équipe aussi, on venait d’ĂȘtre champion, j’étais en pleine confiance et je me suis battu comme un lion comme j’ai toujours fait, j’étais remontĂ© comme une pendule et ça a fait la diffĂ©rence, j’ai dĂ©butĂ© contre les Anglais alors que je n’avais qu’une sĂ©lection et demi dans les jambes je crois qu’on ne le reverra plus ce cas de figure. »
Et la demi-finale face aux Allemands ? est ce que tu t’es rendu compte de la dramaturgie ?
HonnĂȘtement non, il n’y qu’à voir notre attitude, on est restĂ© cool, alors qu’on s’est fait massacrĂ© par les Allemands avec la bĂ©nĂ©diction de l’arbitre, quand tu revois le match… J’en parlais avec Giresse, il n’ y a pas longtemps, il m’a dit : « Mais Jean Luc, on s’est fait entuber du dĂ©but jusqu’ Ă  la fin. » En fait, on n’avait qu’une envie Ă  3 Ă  1 c’était de leur en mettre 4,5 et au final on perd, on a Ă©tĂ© trop joueur, on a manquĂ© d’expĂ©rience et de roublardises. Platini l’a dit : « si j’avais eu un an d’Italie avant ce match lĂ , le scenario aurait changĂ©. » Mais, mais
 je pense que l’arbitre a quand mĂȘme jouĂ© un rĂŽle important. »
A la fin de ta carriĂšre de joueur tu as occupĂ© plusieurs fonctions au club, c’était logique ?
« Je ne sais pas si c’était logique mais c’était une forme de reconnaissance du club, il y a un proverbe qui dit « Pour prĂ©voir l’avenir, il faut connaĂźtre le passé » donc c’était important de transmettre, d’ĂȘtre la passerelle, d’expliquer et de guider ceux qui arrivaient parce que l’ASM n’est pas un club comme les autres. »
Est-ce que tu suis toujours les rĂ©sultats de l’as Monaco ?
« (il rigole) Oui bien sĂ»r, c’est un club qui te prend aux tripes. Quand je croise un ancien, on parle de l’AS Monaco. C’était le cas avec Delio Onnis derniĂšrement. On a passĂ© trois jours ensemble. On n’a parlĂ© que de Monaco ou presque. J’ai eu la chance de connaitre quatre gĂ©nĂ©rations, j’ai commencĂ© avec Dalger, Petit, j’ai fini avec Thuram et Manu Petit, on a tous le club gravĂ©, donc bien sĂ»r que je suis le club. »

Du tac au tac

Le stade qui t’a le plus marquĂ© ? (ExceptĂ© le Louis 2)
« San Siro… et le stade de Rotterdam
 »
L’avant-centre qui t’a le plus embĂȘtĂ© ?
« Peut-ĂȘtre pas celui qui m’a mis le plus de buts mais qui m’a embĂȘtĂ© le plus c’est Bernard Lacombe. »
LE coéquipier ?
« Je pourrai dire Claude Puel parce qu’on a fait plus de 500 matchs ensemble, celui qui m’a le plus bluffĂ© c’est Hoddle ce que les gens voyaient en match, et ce que nous ont voyait Ă  l’entrainement, du talent Ă  revendre et la classe en plus.»
Photo : Reportage magazine – Monaco Photo : Alain De Martignac – Icon SportÂ